Enfance et stratégies d'histoire de vie (2014)




De Janvier 2014 à Janvier 2015, j’ai effectué mon premier post-doctorat en biologie évolutive humaine (psychologie évolutive, plus précisément), à l'école de psychoéducation de l’Université de Montréal (Québec, Canada).





Ce travail, financé par le Groupe de Recherche sur les Inadaptations Sociales de l’Enfance (GRISE), portait sur l’impact de l’environnement rencontré durant l’enfance sur le comportement social et les stratégies d'accès aux partenaires, avec une perspective évolutive.


Les troubles du comportement social (agressivité directe ou indirecte, prise de risque extrême, etc.) constituent un important problème de société. L’hypothèse d’une origine évolutive mène à repenser ces troubles comme l’expression d’une stratégie d’histoire de vie développée de manière inconsciente en réponse à un environnement donné. En effet, l’environnement rencontré durant l’enfance est le premier signal des conditions futures d’accès aux ressources. Nos capacités cognitives ont donc pu évoluer pour y répondre par le développement d’une stratégie visant inconsciemment à maximiser la transmission des gènes dans les conditions rencontrées. 




En termes de comportements reproducteurs, une stratégie consistant à maximiser le nombre de partenaires pourrait ainsi être favorisée dans un environnement imprévisible, où la survie et l’accès aux ressources (matérielles et/ou affectives) sont perçus comme incertains. En effet, dans un environnement hostile, se reproduire dès que possible et maximiser le nombre de descendants augmente la probabilité qu’au moins l’un d’entre eux parvienne ensuite à se reproduire malgré les conditions défavorables rencontrées. 

Or, l’agressivité (directe ou indirecte) et la prise de risque sont des traits dont l’origine évolutive réside dans la compétition pour l’accès aux partenaires, et pourraient donc être aussi les manifestations d’une telle stratégie. La théorie de l'évolution nous prédit donc qu'un environnement imprévisible rencontré durant l'enfance devrait favoriser le développement de ces comportements.

Avec mes co-auteurs, nous avons décrit ce modèle dans un chapitre d'ouvrage francophone : 

Aimé C., Déry M., Verlaan P., Paquette D., 2016.  “Une approche évolutionniste de la relation entre l’environnement de l’enfant, les stratégies d’histoire de vie et le développement des troubles du comportement.” In Santé, médecine et sciences de l’évolution : les troubles psy expliqués par la théorie de l’évolution, F Thomas, M Raymond. Ed. DeBoeck. 




J’ai ensuite testé ce modèle en étudiant les trajectoires de développement des comportements d’agression en fonction de l’environnement chez 749 enfants suivis entre les âges de 6 et 15 ans

Ce travail a aussi permis de mieux comprendre les effets des pratiques parentales sur le développement des troubles du comportement, dont certains sont modérés ou accentués par le tempérament de l'enfant. Par tempérament, on entend l'ensemble des prédispositions innées, biologiques, qui font que deux enfants différents réagiront différemment à un environnement similaire. Mais le tempérament, en plus de sa dimension innée, interagi bien sur avec l'environnement physique et social. Il pourrait ainsi représenter l'un des mécanismes qui encouragent l'individu à développer inconsciemment une stratégie d'histoire de vie différente en fonction de l'environnement qu'il perçoit.      

Aimé, C., Paquette, D., Déry, M., & Verlaan, P. (2018). Predictors of childhood trajectories of overt and indirect aggression: An interdisciplinary approach. Aggressive behavior44(4), 382-393.


De plus, je termine actuellement un nouvel article démontrant le lien entre les troubles du comportement durant l’enfance et les stratégies de reproduction développées par la suite:


Aimé C., Déry M., Verlaan P., Paquette D. “Can evolution help to explain the development of externalising and internalising behaviours in girls and boys? Testing of a transdisciplinary model”. En préparation.


Commentaires